« Lettre ouverte au Ministre de la Justice à propos du Conseil National de la Médiation » par la CPMN (Chambre Professionnelle de la Médiation et de la Négociation) du 10/08/2023 (officieldelamediation.fr)


« Le ministère de la Justice a publié le 25 mai 2023 la composition du Conseil National de la Médiation. En tant que promoteurs de la profession de médiateur depuis 20 ans, nous souhaitons faire part des préoccupations des professionnels de la médiation. La sélection limitée des organisations et des personnes appelées à siéger dans cette nouvelle instance a des conséquences graves. De plus, des questions tout aussi préoccupantes se posent quant à la composition du collège des Ambassadeurs de l’Amiable que vous avez désignés. 

En effet, la composition de ces nouvelles instances vient confirmer une observation sur l’influence que subit le système judiciaire avec maintenant l’intégration de modélisations engagées de la médiation.

Sans doute à son insu, par habitude de pensée, le législateur favorise ce type de médiation. Il néglige la réalité de la diversité des conceptions et des pratiques de la profession de médiateur, établie depuis plusieurs décennies. 

Dans le domaine de la médiation, il existe plusieurs conceptualisations engagées sur des champs confessionnels et idéologiques, largement reconnues comme faisant autorité. Dans ces approches, il est courant de ne pas distinguer la philosophie des idéologies et les religions, et l’éthique de la morale, de même pour la rigueur par rapport à la bienveillance, ainsi que la rationalité et la méthode du raisonnable et du raisonné. 

Cette variété de conceptions peut donner l’apparence d’une approche plurielle. Pourtant, elle reste limitée à une modélisation qui s’est imposée depuis le 17e siècle, celle du rapport au contrat social et donc au juridisme. Elles se conjuguent avec une démarche œcuménique qui véhicule les représentations religieuses. Elles ont donné naissance à une conception de l’alternative qui promeut un nouveau système des modes alternatifs de règlement des différends. Nous pouvons l’appeler le « MARDisme ». Ce système est présenté comme une alternative, censée offrir une autre pratique, mais en réalité, il est fortement soumis à la pensée juridique et à son corollaire, la juridicisation. En conséquence, il ne parvient pas à réduire les dépenses publiques. Plusieurs études rigoureuses montrent que ces pratiques ne répondent pas aux attentes. Seules 30% des médiations aboutissent à un accord.

En réalité, le contenu des MARD ne représente qu’une partie de la diversité des conceptions et des pratiques de la médiation. 

Ce que les initiateurs de la médiation professionnelle et de la profession de médiateur représentée par la CPMN, peuvent apporter est une contribution ouverte à la diversité des opinions. Depuis plus de 20 ans, il est reconnu que la médiation est influencée par quatre courants de pensée. Trois de ces courants sont fortement représentés (confessionnel, juridique et psychosocial), tandis que le courant rationnel, porteur de la profession de médiateur, n’est pas représenté dans ces nouvelles instances placées sous la tutelle de la chancellerie.

En favorisant une plus grande diversité dans la composition du Conseil National de la Médiation et du collège des Ambassadeurs de l’Amiable, où la majorité des membres ont été formés à l’Institut Catholique de Paris (8 sur 9), le législateur témoignerait de sa volonté de prendre en compte les différentes facettes de la médiation et de valoriser les compétences et les connaissances spécifiques développées par les professionnels de ce domaine. Il démontrerait aussi son attachement aux valeurs républicaines dont l’importance de préserver la laïcité des institutions.

Au fil des années, la médiation professionnelle et la profession de médiateur ont accumulé une expertise et des connaissances spécifiques reconnues dans le monde du travail et au sein des plus grandes entreprises et des administrations. Les objectifs de la médiation professionnelle sont centrés sur les problématiques relationnelles, ce qui la rend immédiatement plus performante dans la perspective de la recherche de résolution de conflit. L’instrumentation de cette approche ne repose ni sur des aspects moraux ni sur des conceptions juridiques ou psychosociales, mais sur une technicité originale, l’ingénierie relationnelle. Elle promeut la qualité relationnelle, apporte des garanties sur la liberté de décision et l’investissement dans la pérennité des ententes établies, jusque dans le paradigme de l’Entente Sociale. Le débat et les décisions concernant le système judiciaire peuvent bénéficier de points de vue innovants, plutôt que de s’appuyer sur des modèles anciens qui doivent évoluer pour améliorer la performance de ce service public. 

En développant comme nous le faisons en entreprise un dispositif de médiation clairement indépendant, en amont des décisions arbitrales, nous pourrons garantir un système judiciaire plus ouvert, inclusif et performant, répondant aux attentes des individus et des organisations dans leur quête de résolution pacifique des conflits.

Soyez assuré, Monsieur le Ministre, de notre engagement pour une médiation professionnelle au service des personnes, développée avec des garanties éthiques et déontologiques. Notre contribution témoigne de notre expertise et de notre efficacité, en dehors de toute instance créée de manière circonstancielle. Veuillez recevoir l’expression de nos salutations distinguées.

Ressources 

  1. Etude de la mission de recherche Droit et Justice, maj de Janvier 2021 http://www.gip-recherche-justice.fr/publication/levaluation-de-lexperimentation-de-tentative-de-mediation-obligatoire/
  2. Tirer les leçons de l’échec de la médiation sous tutelle judiciaire, 20 ans de médiation judiciaire au civil, juin 2015 https://www.village-justice.com/articles/Tirer-lecon-echec-mediation-sous,19867.html
  3. Bible et Médiation, webinaire avec Béatrice Blohorn-Brenneur https://cemaphores.org/webinaire-a-venir/ 
  4. le site de la chambre professionnelle de la médiation et de la négociation, avec son code d’éthique et de déontologie https://www.cpmn.fr 
  5. le site du centre de recherche en entente interpersonnelle et sociale et ingénierie relationnelle https://www.creisir.fr 
  6. l’annuaire de la profession de médiateur https://www.allomediateur.com
  7. CMPJ : Club des Médiateurs Professionnels Judiciaires
  8. CPMC : Club des Praticiens et Médiateurs de la Consommation
  9. EPMN : Ecole Professionnelle de la Médiation et de la Négociation
  10. CREISIR : Centre de Recherche en Entente Interpersonnelle et Sociale et Ingénierie Relationnelle
  11. CPMN : Chambre Professionnelle de la Médiation et de la Négociation

Extrait de officieldelamediation.fr du 10/08/2023)

Lettre ouverte à consulter sur https://www.officieldelamediation.fr/2023/08/10/lettre-ouverte-au-ministre-de-la-justice-a-propos-du-conseil-national-de-la-mediation/

« Lettre ouverte à M. Tabuteau : A propos du référentiel des médiateurs administratifs » par Edith Delbreil Sikorzinski Jean-Louis Lascoux (officieldelamediation.fr)


A l’attention de Monsieur Didier-Roland TABUTEAU
Vice Président du CONSEIL D’ÉTAT
1 place du Palais Royal
75001- PARIS-

Bordeaux, le 08 Décembre 2022

Monsieur le Vice-Président,

Le 18 novembre dernier, vous avez initié une note intitulée « référentiel de sélection des médiateurs à l’usage des juridictions administratives », considérant que les dispositions législatives en la matière ainsi que la Charte éthique des médiateurs dans les litiges administratifs élaborée en 2017 étaient insuffisants et ne permettaient pas de sélectionner « le meilleur » des médiateurs. Quant à la liste des médiateurs judiciaires établie dans le ressort des cours d’appel, celle-ci ne tiendrait pas compte d’une spécificité, celle relative au droit administratif.

Vous relevez la différence fondamentale qu’il y a entre la mission du juge administratif et celle d’un médiateur, considérant que le premier est un expert du droit et le second un expert de la médiation et nous vous en remercions, précisant même qu’un médiateur est un expert de la relation avant tout.

Partant de cette différence, la désignation par le juge administratif d’un médiateur doit se concevoir non pas comme un prolongement du contentieux ouvert mais comme une orientation de ce même contentieux vers un autre mode de résolution de conflit à part entière et autonome. Cette « passation » ne peut donc se faire que de professionnel à professionnel, et nous vous rejoignons sur cette idée. Toute personne, y compris juristes de métier, ne peut s’improviser médiateur.

Reste à savoir ce que l’on entend par professionnel et sur ce point, un référentiel éthique et déontologique est nécessaire. Cela étant, il semble que vous ne soyez pas en possession de toutes les informations dans ce domaine et nous sommes étonnés que référence soit faite à un livre blanc qui aurait été établi en 2017 par une association de médiateurs concurrente, à l’occasion d’un événement privé, interne à cette organisation, même si l’intitulé d’« états généraux de la médiation » est trompeur.

Médiation 21 est une association parmi d’autres qui ne saurait légitimement prétendre représenter l’ensemble des médiateurs dans leur ensemble, et de fait, bénéficier d’une quelconque exclusivité à vos côtés, dans le cadre d’un groupe de travail à venir, pour débattre d’un référentiel à imposer à ses concurrents.

Notre association, l’Ecole professionnelle de la médiation et de la négociation, EPMN, intervient depuis plus de 20 ans dans le champ de la médiation professionnelle. Elle forme des médiateurs judiciaires dans tous les domaines judiciaires et conventionnels : administrations, famille, et plus largement dans le civil, la consommation, le prud’homal et le commercial. A ce titre, elle a sollicité son intégration au sein du comité national de médiation.

Depuis 1999, nous faisons la promotion du droit à la médiation, du recours à la médiation obligatoire, de la médiation professionnelle, de la profession de médiateur, de la qualité relationnelle et du paradigme de l’entente et de l’entente sociale. Nous affirmons l’éthique et la déontologie de la profession du 21ème siècle, avec un code repris sous des formes variées par les associations de médiation traditionnelle. Nous organisons un événement international et nous avons notamment contribué aux Etats Généraux de la Justice organisés en décembre 2021, par le Ministère de la Justice.

Tout médiateur sortant de l’EPMN et diplômé du CAP’M (Certificat d’aptitude à la profession de médiateur) est intégré à la chambre syndicale internationale, la CPMN (Chambre professionnelle de la médiation et de la négociation). Il est un professionnel dans le sens où il exerce pleinement la profession de médiateur, est soumis à un CODEOME (Code d’éthique et de déontologie des médiateurs professionnels) et est régulièrement assuré.

Les médiateurs professionnels interviennent avec une méthodologie spécifique, l’ingénierie relationnelle et la qualité relationnelle, dans tous les domaines d’activité. Certains d’entre eux, médiateurs judiciaires ou pas, sont régulièrement désignés par des juridictions administratives et les résultats ont été à ce jour, plus que probants.

Pour tout vous dire, alors que nous avons développé depuis plus de 20 ans la profession de médiateur avec des processus structurés et un savoir-faire unique, nous sommes inquiets de la volonté affirmée par des associations du mouvement religieux notamment, de faire placer la médiation sous une autorité publique, atteignant ainsi à l’indépendance qui doit la caractériser, dans le respect de la laïcité et de l’altérité.

Si un groupe de travail doit être constitué au sein du Conseil d’État ou ailleurs, il ne pourra l’être qu’avec la participation de l’ensemble des acteurs principaux de la médiation, en tenant compte de la concurrence et des divers courants de pensée existants.

Aussi, nous sommes à votre disposition pour vous rencontrer et contribuer au nécessaire éclairage des juridictions administratives pour un meilleur développement de la médiation en tant que mode résolutoire des conflits.

Nous espérons vivement que la médiation en matière judiciaire et administrative ne soit pas accaparée par un courant idéologiquement et religieusement influent, alors que déjà des problématiques de concurrence apparaissent sur le marché de la médiation dans tous les domaines (formation, intervention, présence dans les instances).

Vous remerciant par avance de toute votre attention, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Vice-Président, l’expression de nos salutations distinguées.

Edith Delbreil Sikorzinski

Jean-Louis Lascoux

Lettre ouverte à consulter sur : https://www.officieldelamediation.fr/2022/12/11/lettre-ouverte-a-m-tabuteau-a-propos-du-referentiel-des-mediateurs-administratifs/

« La médiation : le faux ami du consommateur » par Guillaume Bagard (blogs.mediapart.fr)


« En moins de deux décennies, la médiation s’est imposée dans le paysage juridique français. Cette belle idée a d’abord été portée par la société civile, mais elle a été par la suite préemptée par l’Etat et dévoyée afin de désengorger le système judiciaire. Dans ces conditions, que peut faire le consommateur soucieux de porter rapidement son litige en justice ?  

L’essor de la médiation

Avant 2006, l’État s’intéressait peu à cette pratique, mais il existait déjà des initiatives au sein des entreprises pour instituer la médiation afin de permettre la résolution amiable d’un certain nombre de  litiges.
Par exemple, le groupe Gaz de France, aujourd’hui ENGIE, a nommé, dès 1998, son premier  médiateur, Michel Duhen. En 1999, Gaz de France signait une convention avec les associations de consommateurs pour définir ce que devaient être les missions d’un médiateur.
En matière de droit de la consommation, c’est à partir de 2006 qu’apparaît le premier médiateur d’État, le médiateur national de l’énergie qui a le statut d’autorité publique indépendante. Son objectif est de traiter les nombreux litiges entre consommateurs et opérateurs d’énergies. » (Extrait de blogs.mediapart.fr du 25/11/2022)

En savoir plus sur https://blogs.mediapart.fr/guillaumebagard/blog/221122/la-mediation-le-faux-ami-du-consommateur?at_medium=custom3&at_campaign=67&s=09

Thèse : « Violences machistes et médiation familiale en Catalogne et en Espagne. Enjeux de la mise en œuvre d’un cadre légald’inspiration féministe » par Glòria Casas Vila, Université de Lausanne, 2016, 657 p.


RÉSUMÉ / ABSTRACT
« Cette thèse porte sur les réponses politiques aux violences machistes et leur lien avec les
réformes du Droit de la Famille, parmi lesquelles la médiation familiale, en Espagne et en
Catalogne. Depuis plus d’une dizaine d’années, grâce au mouvement féministe, des lois
spécifiques y considèrent les violences comme un problème lié aux discriminations que
subissent les femmes. À partir d’une recherche combinant l’analyse de la littérature et de
sources statistiques, une enquête par entretiens semi-dirigés et des observations directes, cette
thèse porte plus spécifiquement sur l’interdiction de la médiation familiale en situation de
violences machistes. Dans la première partie de la thèse, j’analyse les frames ou cadres de sens
féministes sur les violences, et conceptualise les limites de la médiation à partir de ces théories-
là. Dans la deuxième partie, j’analyse le parcours législatif sur les violences en Espagne pour
souligner autant les avancées dans ce champ, après presque 40 ans de dictature franquiste, que
les obstacles de traduction juridique des frames féministes (2005-2015). Dans la troisième
partie, j’examine la mise en œuvre de la loi par des opérateurs socio-juridiques
(médiateur/trices, psychologues, avocat·e·s et juges), et je montre comment ces derniers font
sens de la loi, et comment certain·e·s requalifient les violences machistes comme de simples
conflits familiaux. À partir de l’observation directe de séances d’information à la médiation
familiale intra-judiciaire, je montre comment les médiateurs ou médiatrices en viennent parfois
à empêcher les femmes de parler des violences. Finalement, resserrant la focale d’analyse
sur les expériences de femmes séparées avec enfants, mon enquête révèle la manière dont elles
sont parfois revictimisées au cours de la médiation familiale. Cette thèse met en évidence le
décalage entre des lois avant-gardistes d’inspiration féministe, et une application marquée par
la violence institutionnelle, dans une société patriarcale formellement égalitaire et traversée par
des politiques d’austérité. » (Extrait)

Résumé, table des matières et introduction sur : https://www.academia.edu/38204065/Th%C3%A8se_de_Doctorat_R%C3%A9sum%C3%A9_table_des_mati%C3%A8res_et_introduction_

Article : « Une fabrique de la déception. Le devenir de la médiation familiale en France » par Benoit Bastard, Revue interdisciplinaire d’études juridiques 2020/1 (Volume 84), pages 197 à 224


Français

Cet article soulève la question de savoir pourquoi la médiation familiale n’a pas obtenu, en France, le succès attendu par ses promoteurs. Pour étudier son développement en tant que nouvelle pratique, l’analyse prend en considération quatre ensemble de facteurs : les problèmes auxquels la médiation familiale se propose de répondre, l’action des médiateurs, le rôle de l’État et enfin les relations de la médiation avec les autres professions. Trois périodes sont distinguées : celle de la création de la médiation familiale, celle de son institutionnalisation et enfin la période récente dans laquelle elle se trouve mise à l’écart. La déception à l’égard de la médiation familiale apparaît en définitive autant liée à la défection des soutiens sur lesquels les médiateurs comptaient qu’à la surestimation des bénéfices et de l’efficacité qu’on pouvait attendre d’elle.

English

Production of disappointment : the development of family mediation in France

This article explores why family mediation in France has not achieved the success expected by its promoters. In order to study the development of mediation as a new practice, this analysis considers four sets of factors : the problems that family mediation aims to address, the action of mediators, the role of the State and finally how mediation relates to other professions. Three periods are distinguished : the creation of family mediation, its subsequent institutionalisation and, finally, the more recent period in which mediation has been sidelined. Disappointment with family mediation ultimately appears to be linked as much to the loss of supports on which mediators relied as to the overestimation of the benefits and efficiency that could be expected from it.

Article à consulter sur https://www.cairn.info/revue-interdisciplinaire-d-etudes-juridiques-2020-1-page-197.htm?contenu=article

« La médiation n’est pas un mode alternatif de règlement des conflits » par Roger Tudela, Avocat. (village-justice.com)


« Plus de 10 ans après le texte de base la structurant [1], on s’interroge sur les difficultés rencontrées par la médiation pour s’imposer dans notre paysage juridique et judiciaire malgré ses atouts incontestables.
Les multiples raisons à l’origine de ces difficultés ont aujourd’hui quasiment disparues faisant de la médiation un mode de règlement amiable des conflits, bien plus qu’un mode alternatif (II)

/ Pourquoi a-t-il été si difficile d’imposer la médiation comme mode de règlement des différends à part entière.

C’est naturellement une certaine peur de l’inconnu qui a généré des oppositions de principe, pour les professionnels comme pour les justiciables.

Mais cela seul ne peut expliquer le rejet d’un processus pendant autant de temps.

Il faut chercher ailleurs, les raisons de cet échec peut être dans la communication qui l’a accompagnée.

Marshall B. Rosenberg indiquait [2] que « Les mots peuvent ouvrir des portes mais aussi parfois en fermer ». On se doit de constater que pour la médiation les portes sont restées fermées pendant trop longtemps alors que l’intégration des modes amiables au sein de notre système judiciaire s’imposait chaque jour un peu plus.

Le texte fondateur aura bientôt 30 ans puisque la médiation apparait dans notre droit positif dans l’article 21 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995, complétée par l’ordonnance du 16 novembre 2011, qui définit plus précisément le processus.

La loi de 1995 limite la médiation à une décision du juge alors que l’ordonnance ouvre le processus aux parties.

A l’instar des « soft justices » américaines, tous s’accordaient à prévoir un succès rapide de la médiation, processus simple, rapide et peu onéreux.

Le succès attendu n’était malheureusement pas au rendez-vous. C’était en effet oublier qu’au-delà des textes, l’engagement de toutes les parties prenantes est nécessaire. » (Extrait de village-justice.com du 19/09/2022)

En savoir plus sur https://www.village-justice.com/articles/mediation-est-pas-mode-alternatif-reglement-des-conflits-est-tout-simplement,43614.html?utm_source=dlvr.it&utm_medium=linkedin&utm_campaign=RSS

Suisse : Le bureau de médiation administrative de Genève sous le feu des critiques


« Genève, le bureau de médiation administrative (BMA) est sous le feu des critiques. Le Grand Conseil émet des doutes sur le bon fonctionnement de cette entité indépendante au sein de l’Etat qui vise à gérer de façon simple et extrajudiciaire les conflits entre l’administration et les administrés.

Un rapport de la commission de gestion chargé d’étudier le rapport l’activité du BMA a été discuté vendredi au Grand Conseil. Ses conclusions sont sévères. Les commissaires émettent « des doutes sur le fait que l’intention du législateur soit reflétée dans l’activité du BMA et que les compétences du médiateur soient à la hauteur des enjeux ».

Le Grand Conseil a refusé par 58 voix contre 22 de prendre acte du rapport d’activité en plénière, manifestant ainsi ses doutes. Le BMA a été sollicité 340 fois en 2020, ce qui est relativement peu, estime le député PLR Alexis Barbey. De plus, le BMA ne fait pas vraiment de la médiation, mais plutôt de la facilitation, a relevé le député. »

(…)

Un projet de loi devrait être déposé pour modifier le fonctionnement du BMA. Selon ce projet, le médiateur devrait notamment disposer d’une formation certifiée en médiation généraliste, ce qui n’est pas le cas actuellement.

Les prestations du BMA sont gratuites. Cette entité couvre l’ensemble des administrations cantonales et communales genevoises, ainsi que les établissements publics autonomes et tous les autres organismes chargés de missions de droit public. » (Extrait de msn.com du 24/06/2022)

En savoir plus sur https://www.msn.com/fr-fr/actualite/undefined/le-bureau-de-mdiation-administrative-sous-le-feu-des-critiques/ar-AAYPGAQ?ocid=sapphireappshare

Conseil de prud’hommes : faut-il favoriser la médiation ? La position du syndicat Force Ouvrière (FO)


(…)

Pour Force Ouvrière (et notre Congrès de 2022 l’a rappelé expressément dans la résolution sociale), si une justice prud’homale rapide et efficace peut passer par davantage de résolution à l’amiable des litiges, notre organisation rappelle sa ferme opposition à toute forme de médiation (qui est en train d’envahir toutes les juridictions : voir notamment le décret n°2022-245 du 25 février 2022 et la loi n°2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire), et souligne qu’une phase de conciliation efficiente devant le CPH suppose le rétablissement d’une comparution personnelle des parties, sous peine de sanctions financières.

FO invite fortement ses conseillers prud’hommes à mieux utiliser la phase de conciliation obligatoire devant le CPH (le BCO ne doit pas hésiter, lorsqu’il le juge nécessaire, à obliger l’employeur à comparaître personnellement en vertu du dernier alinéa de l’article R 1454-1 du code du travail. En effet, si le fait d’imposer la comparution personnelle des parties nécessite de renvoyer l’affaire à une audience ultérieure, un renvoi à bon escient peut aboutir finalement à de réelles chances de concilier. L’efficacité de la justice peut passer par le fait que le BCO se donne le temps et donne le temps aux parties de concilier) et à bannir la médiation judiciaire, qui est de nature à affaiblir la spécificité de la juridiction prud’homale. Le préliminaire de conciliation devant la juridiction prud’homale constitue une formalité substantielle ; l’omission de cette formalité est susceptible d’entraîner la nullité du jugement.

Au final, la médiation judicaire ne peut éventuellement trouver son intérêt que lorsque la phase de conciliation devant le CPH n’est pas obligatoire (ex : référé, requalification d’un CDD en CDI)… mais, en aucun cas, elle ne doit servir à « assécher » la justice prud’homale.

La médiation judiciaire ne doit jamais supplanter la conciliation devant le BCO. La gratuite et l’oralité de la procédure doivent être maintenues coûte que coûte. L’État se doit avant tout de renforcer les moyens matériels et humains des CPH et non ériger des obstacles à la saisine du juge malheureusement de plus en plus nombreux, la médiation judiciaire en ce qu’elle constitue une alternative au juge s’inscrit totalement dans cette tendance. » (Extrait de force-ouvriere.fr du 20/06/2022)

En savoir plus sur https://www.force-ouvriere.fr/conseil-de-prud-hommes-faut-il-favoriser-la-mediation

« Empathie du médiateur, un manque de professionnalisme » par Jérôme Messinguiral (officieldelamediation.fr)


« Si le titre de l’article vous froisse les oreilles, il vaut mieux passer votre chemin, parce que le contenu risque de vous donner de l’urticaire.

En effet, loin du dogme actuel de l’empathie à toutes les sauces et de la bienveillance, nous allons voir pourquoi il s’agit d’une faute professionnelle pour un médiateur professionnel. L’occasion de s’appuyer sur l’essence des mots et leur redonner leur sens sans partir dans tous les sens. Un bon carburant pour la réflexion personnelle d’un médiateur professionnel, mais aussi pour tout professionnel qui intervient auprès des personnes.

La définition du Robert est très claire pour l’empathie : « Capacité de s’identifier à autrui dans ce qu’il ressent. »

A la lecture de cette définition, les médiateurs professionnels savent déjà où je veux en venir, mais tout le monde n’est pas médiateur professionnel et la posture peut surprendre, voire choquer, pourtant, elle est primordiale.

Un médiateur professionnel doit être neutre, indépendant et impartial (voir le dossier complet). La neutralité s’entend vis à vis de la solution que les parties peuvent proposer, l’indépendance vis à vis de toute autorité, l’impartialité vis à vis, bien sûr, des parties.

S’il n’est pas neutre, le médiateur professionnel va juger les propositions émises par les parties et les amener à les modifier, mais seules les parties savent ce qui est le mieux pour leur relation, si un médiateur propose une solution, il n’est plus médiateur professionnel, il fait du conseil, c’est un conseiller, et les conseilleurs ne sont pas les payeurs…

S’il n’est pas indépendant, cela signifie qu’il va se soumettre, pour sa pratique, à un tiers (tribunal, organisation qui demande médiation pour des salariés, etc), ce qui peut avoir des conséquences sur sa neutralité et son impartialité, mais aussi sur sa pratique et donc ses résultats en tant que médiateur.

S’il n’est pas impartial, il devient l’avocat d’une partie contre l’autre, là non plus, ce n’est plus de la médiation mais de l’arbitrage privé.

Sans neutralité, indépendance et impartialité, pas de médiation professionnelle possible. Ok, merci pour l’info, mais quel est le rapport avec l’empathie ?

L’empathie, nous l’avons vu au début de cet article, est la capacité de se mettre à la place de l’autre et de ressentir ce que l’on imagine que l’autre ressent. Si je mets à la place de l’autre, dans ma pratique professionnelle, je vais prendre partie, juger les propositions, défendre la partie faible, bref, je perds mon impartialité et ma neutralité.

Les médiateurs professionnels n’ont donc aucune empathie ?

Car nous parlons bien de la pratique professionnelle du médiateur. Je, en tant que médiateur professionnel, peut avoir de l’empathie pour les personnes en face de lui, mais cette empathie est contre-productive pour sa pratique, il faut donc que le médiateur professionnel s’appuie sur autre chose et qu’il garde cette empathie pour lui, afin de permettre aux personnes accompagnées de trouver une solution commune dans leur projet relationnel.

Alors à la place de l’empathie, que doit utiliser le médiateur professionnel ?

Et bien c’est l’altérité. On ne se met pas à la place de l’autre, on ne pourra jamais savoir ce qui se passe dans sa tête, on ne pourra jamais ressentir ce que l’autre ressent, on ne fait qu’imaginer ce que l’on ressentirait si on était à sa place, tout à fait aléatoire comme technique.

L’altérité, c’est ne pas se mettre à la place de l’autre, mais permettre à l’autre de s’exprimer sur tous les aspects de la situation : les faits, tels qu’il les a identifiés (avec une possible source d’erreurs d’interprétations), les conséquences personnelles de ces faits, et les émotions consécutives à ces faits et ces conséquences. » (Extrait officieldelamediation.fr du 1/11/2021)

En savoir plus sur https://www.officieldelamediation.fr/2021/11/06/empathie-du-mediateur-un-manque-de-professionnalisme/

À Calais, la médiation est dans une impasse


La Croix logo

« Les propositions de Didier Leschi, revenu à Calais mardi 2 novembre pour poursuivre sa médiation, ont été rejetées par les associations soutenant les grévistes de la faim, qui entendent continuer leur action.

(…)

À peine une demi-heure après avoir commencé à recevoir leurs représentants dans les locaux d’un foyer pour jeunes travailleurs, le médiateur du gouvernement est sorti sous les huées d’une quarantaine de militants qui l’attendaient à l’extérieur. Le haut fonctionnaire, directeur général de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii), a ensuite quitté les lieux dans une voiture, sans faire la moindre déclaration. » -P. Charrier -(Extrait de la-croix.com du 2/11/2021)

En savoir plus sur https://www.la-croix.com/France/A-Calais-mediation-impasse-2021-11-02-1201183272

« Faut-il une médiation sous la tutelle du ministère de la justice ? » par Edith Delbreil  (officiel de la mediation.fr)


« Le monde judiciaire est dans un état de difficultés tel que ministre de la justice et parlementaires ont envisagé l’élaboration d’une loi intitulée « loi pour la confiance dans l’institution judiciaire ». Et, tandis que de nombreux citoyens manifestent leurs inquiétudes sur le grignotement de leurs droits, dans cette période pré-électorale pour les présidentielles 2022, le gouvernement met en place une consultation dite « Etats Généraux de la justice », avec un site dédié « Parlonsjustice.fr »

Restons sur le projet de loi. Était concerné principalement le champ pénal. Les motivations déclarées du garde des Sceaux, ministre de la Justice, relativement à ce projet de loi sont de vouloir « restaurer la confiance des français dans la justice » ; pour ce faire, il s’est agi de recourir à une technique hors cadre : la médiation ! Qu’en penser ? La solution peut bien paraître paradoxale, puisque la décision de médiation est confiée à ceux-là même en qui la confiance est à restaurer !

En première mouture, avec l’article 29 le greffe avait « pour apposer la formule exécutoire pour les transactions et accords issus de médiations de conciliation ou de procédure participative lorsqu’ils sont contresignés par les avocats de chacune des parties ».

Subrepticement, un amendement déposé le 4 mai 2021, a été accroché tendant à instituer un conseil national de la médiation sous la tutelle du ministère de la justice, avec pour mission de rendre des avis et proposer aux pouvoirs publics toutes mesures propres à améliorer la médiation, par le biais notamment d’un recueil déontologique proposé par les promoteurs de la médiation traditionnelle avec ses référentiels de formation.  Et la polémique s’est animée.

La médiation, un vieux fer de lance au service du système judiciaire ?

Ce conseil, insiste un magistrat dans un article publié récemment sur Dalloz« pourrait ainsi devenir le fer de lance d’une politique nationale volontariste de développement de la médiation au sein de l’institution judiciaire. »  Le constat se fait aisément que le vocabulaire typique des rapports d’adversité est utilisé pour parler d’un mode voulu pacifique de règlement des conflits. Difficile de sortir de son cadre sémantique. Avec ce langage guerrier, toute proposition nouvelle subit les distorsions qui au final la font entrer dans le cadre des habitudes.

Par ailleurs, l’idée d’un conseil national n’est pas nouvelle. Nous en avons déjà fait la critique en 2014, lorsque le ministère de Christiane Toubira avait esquissé l’idée. « En plaçant la médiation sous la tutelle du ministère de la justice on pourrait croire que le droit ouvre la porte à la médiation mais en réalité, le droit à la médiation n’est pas respecté. »

Le débat juridique sur la médiation, un débat infondé ?

Dans l’environnement juridique, la discussion se disperse autour d’évidences qui ont des difficultés à pénétrer les esprits procéduraux : oui, la médiation peut intervenir à tout moment, avant, pendant ou après une décision judiciaire ; non, il n’y a pas besoin d’avocat, oui, dès lors que les parties trouvent une entente après une décision judiciaire, c’est leur accord qui prévaut. Le juriste tend à s’emparer de la thématique, parce qu’il n’y trouve pas plus sa place que son compte. Il joue des mots et nomme soudain la médiation « post-sentencielle » et en fait débat, alors même qu’en réalité elle n’apporte rien de nouveau. On a ainsi connu les discussions oiseuses sur la place du contradictoire en médiation ainsi que sur la spécificité juridique de l’accord de médiation. De fait, il va bien falloir y venir, la médiation ouvre un nouveau paradigme et ce nouveau droit ne s’enferme pas dans le débat juridique.

Avant toute chose, il serait opportun de s’interroger sur le fait de savoir ce qu’il est attendu de la médiation : un palliatif à une administration judiciaire en berne ou une réelle possibilité offerte à tous justiciables de trouver librement, hors de tout système d’autorité, une solution basée sur un tout autre paradigme ? (Extrait de officieldelamediation.fr du 26/10/2021)

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