« Comme le disait le général de Gaulle au sujet de l’Europe, il ne suffit pas de sautiller comme un cabri sur sa chaise et de répéter « médiation, médiation, médiation » pour qu’elle se développe. Le ministre de la justice, Éric Dupond-Moretti, l’a bien compris en décidant de lancer le vendredi 13 janvier 2023 une politique nationale de l’amiable.
Pour réussir, cette politique devra se manifester par des mesures concrètes et financées, notamment dans le domaine de la formation des acteurs judiciaires, l’organisation des juridictions, l’incitation au recours des modes amiables, la déontologie des médiateurs
Technicité et compétence doivent présider à cette mise en œuvre.
Audience d’orientation : un moment crucial pour le choix de l’amiable
De nombreuses questions restent à approfondir pour permettre au juge français de rendre enfin effectif son office conciliatoire qui participe pleinement de sa mission finale de garant de la paix sociale.
Le rapport sur la justice civile issu des états généraux de la Justice, pour répondre à la question du choix à opérer entre tous les modes de résolutions qui s’offrent aux justiciables, évoque une piste intéressante en proposant pour chaque affaire, une audience d’orientation, en début d’instance, à laquelle comparaîtraient les justiciables, avec leurs conseils, pour évoquer ensemble, avec le juge, les différents modes de résolution des différends (convention de procédure participative, médiation, conciliation par le juge, conciliation déléguée à un conciliateur de justice, actes contresignés par avocats, césure du procès, trancher le litige en appliquant la règle de droit par le juge) et choisir le plus approprié au regard des intérêts et des besoins des parties, de la nature et de l’enjeu du litige.
Tous ces modes sont complémentaires et peuvent interagir entre eux à tout moment de la procédure. Évidemment les moyens doivent suivre pour rendre efficiente cette audience d’orientation.
Si les parties optent pour la médiation ou si le juge décide d’enjoindre les parties de rencontrer un médiateur, se posera alors une question complexe et essentielle à la réussite de ce processus : le choix du médiateur.
« Pour cette première chronique de l’année 2023, Jean-Philippe Tricot, maître de conférences à l’Université de Lille, vous propose de revenir sur plusieurs actualités en matière de modes alternatifs de règlement de différends, notamment sur un arrêt rendu par la 2ème chambre civile le 15 décembre dernier. » (Extrait de lexbase.fr)
« Aujourd’hui, toute personne peut se prévaloir de la qualité de médiateur. Et c’est un véritable souci, du point de vue des usagers de la médiation, qui ne savent où choisir un professionnel. Cela ne facilite pas non plus la tâche des prescripteurs, qui n’ont pas davantage les moyens d’évaluer leurs compétences. C’est pénalisant enfin pour tous les médiateurs qui, cherchant à développer une activité, peuvent pâtir de possibles contre-performances de collègues insuffisamment expérimentés.
Reconnaissons de plus qu’il est complexe et hasardeux de mesurer une compétence. Mener une médiation demande, au delà des savoirs-faire, beaucoup de savoir-être voire un certain talent. Tout cela ne peut s’apprécier que dans de vrais contextes de médiation. Pour autant, il existe de nombreux éléments, qui, quand ils sont réunis, témoignent des efforts et des engagements continus d’un médiateur pour devenir un authentique professionnel. Ces éléments sont notamment une formation initiale suffisante, une formation continue annuelle, une réflexion régulière sur ses pratiques, une adhésion à un code de déontologie, le mentorat de juniors, et une transparence sur l’expérience et l’activité réelle en médiation…
Un groupe de travail du collectif Médiation 21, dont le SYME est un membre fondateur, a longuement travaillé sur ces différents critères. Ils définissent ce que nous appellerons désormais la ‘Qualification Médiation 21’. Le collectif a également validé que chacune de ses entités membres aurait, à compter de janvier 2023, et à titre expérimental pour l’instant, la possibilité d’attribuer, à ses adhérents, cette qualification au nom de Médiation 21, sous réserve d’effectuer une vérification rigoureuse que les critères de qualification sont atteints.
Le SYME est en train de préparer les outils qui lui permettront tout prochainement de proposer cette qualification à ses adhérents, et de contribuer, à son niveau, mais de la façon la plus active, au développement national de cette qualification. Il est clair en effet que cette qualification n’aura d’impact que si elle est largement diffusée. Le développement de cette qualification permettra aussi l’établissement, au niveau national, de listes de médiateurs et de statistiques d’activité, deux éléments dont l’absence est perçue comme un obstacle à une bonne perception de la médiation dans notre pays.
L’enjeu de cette qualification est donc particulièrement important, tant en termes de crédibilité que de visibilité et de communication des médiateurs. Nous ne manquerons pas de vous tenir informés, dans les prochaines semaines, de notre avancement pour l’attribution de cette qualification. » (Extrait de syme.eu du 14/01/2023)
« Dans un arrêt rendu le 15 décembre 2022, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation précise que les fonctions de médiateur à quelque titre que ce soit sont incompatibles avec celles de conciliateur de justice.
On sait que parmi les modes de règlement amiable des différends, la conciliation de justice peut être déléguée par le magistrat à un tiers, le conciliateur de justice qui exerce cette fonction à titre gratuit, et ce par application du décret n° 78-381 du 20 mars 1978 (N. Fricero, C. Butruille-Cardew, L. Benrais, B. Gorchs-Gelzer et G. Payan, Le guide des modes amiables de résolution des différends, 3e éd., Dalloz, coll. « Guides Dalloz », 2017, n° 120.11). Mais certaines questions restent parfois obscures en pratique, et ce assez régulièrement. Par exemple, une fois le conciliateur de justice nommé, ce dernier peut-il s’inscrire pour exercer les fonctions de médiateur dans le même temps ? Il faut dire que les textes ne donnent pas de réponse claire sur ce point si bien que l’interrogation subsiste assez régulièrement devant les juridictions pratiquant la conciliation. L’arrêt rendu le 15 décembre 2022 par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation répond, sans guère de nuance par la négative si bien qu’il est intéressant que l’on revienne brièvement sur les faits ayant donné lieu au recours. Une personne, nommée conciliateur de justice le 29 juillet 2020 pour une durée de trois, sollicite son inscription sur la liste des médiateurs de la cour d’appel de Poitiers. La commission restreinte de l’assemblée générale des magistrats du siège rejette sa demande au motif que les fonctions de conciliateur de justice sont incompatibles avec celles de médiateur. L’intéressé forme un recours contre cette décision. » (Extrait de dalloz-actualite.fr du 5/01/2023)
« Selon l’article 2 du décret n° 78-381 du 20 mars 1978, ne peuvent être chargés des fonctions de conciliateur de justice les officiers publics et ministériels et les personnes qui exercent, à quelque titre que ce soit, des activités judiciaires ou qui participent au fonctionnement du service de la justice. Il en résulte que, à l’exception de la médiation de la consommation introduite par l’ordonnance n° 2015-1033 du 20 août 2015 relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation dans le code de la consommation, toute fonction de médiateur, habituelle ou occasionnelle, rémunérée ou bénévole, est incompatible avec la fonction de conciliateur de justice » (Extrait de courdecassation.fr du 15/12/2022)
A l’attention de Monsieur Didier-Roland TABUTEAU Vice Président du CONSEIL D’ÉTAT 1 place du Palais Royal 75001- PARIS-
Bordeaux, le 08 Décembre 2022
Monsieur le Vice-Président,
Le 18 novembre dernier, vous avez initié une note intitulée « référentiel de sélection des médiateurs à l’usage des juridictions administratives », considérant que les dispositions législatives en la matière ainsi que la Charte éthique des médiateurs dans les litiges administratifs élaborée en 2017 étaient insuffisants et ne permettaient pas de sélectionner « le meilleur » des médiateurs. Quant à la liste des médiateurs judiciaires établie dans le ressort des cours d’appel, celle-ci ne tiendrait pas compte d’une spécificité, celle relative au droit administratif.
Vous relevez la différence fondamentale qu’il y a entre la mission du juge administratif et celle d’un médiateur, considérant que le premier est un expert du droit et le second un expert de la médiation et nous vous en remercions, précisant même qu’un médiateur est un expert de la relation avant tout.
Partant de cette différence, la désignation par le juge administratif d’un médiateur doit se concevoir non pas comme un prolongement du contentieux ouvert mais comme une orientation de ce même contentieux vers un autre mode de résolution de conflit à part entière et autonome. Cette « passation » ne peut donc se faire que de professionnel à professionnel, et nous vous rejoignons sur cette idée. Toute personne, y compris juristes de métier, ne peut s’improviser médiateur.
Reste à savoir ce que l’on entend par professionnel et sur ce point, un référentiel éthique et déontologique est nécessaire. Cela étant, il semble que vous ne soyez pas en possession de toutes les informations dans ce domaine et nous sommes étonnés que référence soit faite à un livre blanc qui aurait été établi en 2017 par une association de médiateurs concurrente, à l’occasion d’un événement privé, interne à cette organisation, même si l’intitulé d’« états généraux de la médiation » est trompeur.
Médiation 21 est une association parmi d’autres qui ne saurait légitimement prétendre représenter l’ensemble des médiateurs dans leur ensemble, et de fait, bénéficier d’une quelconque exclusivité à vos côtés, dans le cadre d’un groupe de travail à venir, pour débattre d’un référentiel à imposer à ses concurrents.
Notre association, l’Ecole professionnelle de la médiation et de la négociation, EPMN, intervient depuis plus de 20 ans dans le champ de la médiation professionnelle. Elle forme des médiateurs judiciaires dans tous les domaines judiciaires et conventionnels : administrations, famille, et plus largement dans le civil, la consommation, le prud’homal et le commercial. A ce titre, elle a sollicité son intégration au sein du comité national de médiation.
Depuis 1999, nous faisons la promotion du droit à la médiation, du recours à la médiation obligatoire, de la médiation professionnelle, de la profession de médiateur, de la qualité relationnelle et du paradigme de l’entente et de l’entente sociale. Nous affirmons l’éthique et la déontologie de la profession du 21ème siècle, avec un code repris sous des formes variées par les associations de médiation traditionnelle. Nous organisons un événement international et nous avons notamment contribué aux Etats Généraux de la Justice organisés en décembre 2021, par le Ministère de la Justice.
Tout médiateur sortant de l’EPMN et diplômé du CAP’M (Certificat d’aptitude à la profession de médiateur) est intégré à la chambre syndicale internationale, la CPMN (Chambre professionnelle de la médiation et de la négociation). Il est un professionnel dans le sens où il exerce pleinement la profession de médiateur, est soumis à un CODEOME (Code d’éthique et de déontologie des médiateurs professionnels) et est régulièrement assuré.
Pour tout vous dire, alors que nous avons développé depuis plus de 20 ans la profession de médiateur avec des processus structurés et un savoir-faire unique, nous sommes inquiets de la volonté affirmée par des associations du mouvement religieux notamment, de faire placer la médiation sous une autorité publique, atteignant ainsi à l’indépendance qui doit la caractériser, dans le respect de la laïcité et de l’altérité.
Si un groupe de travail doit être constitué au sein du Conseil d’État ou ailleurs, il ne pourra l’être qu’avec la participation de l’ensemble des acteurs principaux de la médiation, en tenant compte de la concurrence et des divers courants de pensée existants.
Aussi, nous sommes à votre disposition pour vous rencontrer et contribuer au nécessaire éclairage des juridictions administratives pour un meilleur développement de la médiation en tant que mode résolutoire des conflits.
Nous espérons vivement que la médiation en matière judiciaire et administrative ne soit pas accaparée par un courant idéologiquement et religieusement influent, alors que déjà des problématiques de concurrence apparaissent sur le marché de la médiation dans tous les domaines (formation, intervention, présence dans les instances).
Vous remerciant par avance de toute votre attention, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Vice-Président, l’expression de nos salutations distinguées.
« Le juge administratif, en sa qualité de prescripteur de médiations, est chargé de choisir le médiateur à qui il confie ces missions de médiation. Parmi les facteurs de réussite d’une médiation figure celui des qualités professionnelles du médiateur.
Les membres du comité JAM (justice administrative et médiation) et certaines personnalités qualifiées au sein de notre réseau de partenaires médiation (CNB, FFCM, CNPM, ANM, etc.) ont travaillé ces derniers mois autour de la question du « choix du médiateur ». La note annexée à ce post, fruit de ces travaux et réflexions, se veut être un référentiel de sélection des médiateurs à l’usage des juridictions administratives.
En toute transparence, les juridictions administratives ont décidé de rendre publique ce document.
Cette note n’aborde pas la question des médiateurs institutionnels et territoriaux, qui sont pourtant régulièrement désignés dans le cadre de médiations à l’initiative du juge. Cela fera très certainement l’objet d’une note complémentaire dans les prochains mois. » (Extrait de linkedin.com du 25/11:2022
« L’occasion de se pencher sur une étape au combien importante dans le processus de médiation : savoir se présenter, expliquer son rôle et prendre une posture aidante pour ouvrir un espace de dialogue sécurisant.
Nous expérimenterons ensemble en sous-groupes cette première phase et grâce à nos regards croisés, nous pourrons faire ressortir les « ingrédients » qui permettent d’entamer un tel processus de la manière la plus constructive possible.
Cet atelier s’adresse aux personnes qui exercent déjà le métier de médiateur. Un atelier ouvert à tous arrivera bientôt afin d’honorer les personnes curieuses qui désirent en savoir davantage sur la médiation!
« Nous vous avons récemment fait part de la négociation d’une convention collective nationale, unique et étendue dans le secteur social, médico-social et sanitaire à but non lucratif. Cette négociation, qui s’est déroulée à partir du 18 février 2022, s’est terminée au 31 mai 2022, une majorité des syndicats de salariés se déclarant insatisfaite des propositions de ce texte.
A noter que 3 décrets ont été publiés le 28 avril 2022 pour la revalorisation au 1er avril 2022 des métiers de l’accompagnement social et médico-social. Ceux-ci ne permettent pas encore de rendre aux métiers concernés un niveau d’attractivité suffisant. Il faut donc vivement espérer la reprise prochaine d’une concertation sur cette convention collective nationale.
Nous continuons à agir pour que la médiation familiale soit intégrée dans la liste des métiers concernés par cette CCNUE. » (Extrait de syme.eu du 5/06/2022)
« La résolution d’un litige né entre un particulier et un intermédiaire bancaire découle souvent de l’intervention d’un médiateur spécialisé. Le médiateur bancaire, ayant le statut de médiateur à la consommation, pouvant être saisi par toute victime d’un tel différend, est impartial et indépendant de la banque. Il est en ce sens soumis à des évaluations récurrentes de la Commission d’évaluation et de contrôle de la médiation de la consommation (CEMC). Le recours à un tel agent est par ailleurs gratuit et encadré par des organes de régulation, tels que l’Autorité des marchés financiers (AMF). Nous verrons dans cet article, ce qu’est un médiateur, comment le saisir, et comment contester sa décision.
(…)
Peut-on contester la décision d’un médiateur bancaire ?
Pour revenir plus spécifiquement à la question de la décision du médiateur bancaire, une question demeure quant à son éventuelle contestation. En ce sens, est-il possible de remettre en cause la solution apportée par le médiateur, notamment lorsque cette dernière rejette nos prétentions ou traduit une position défavorable ?
L’absence de recours direct contre la solution rendue par le médiateur bancaire
Comme précédemment précisé, la solution proposée par le médiateur bancaire peut faire l’objet d’une libre acceptation par les parties présentes au sein de la procédure. Plus encore, l’ensemble de la médiation est un procédé qui se veut volontaire, et dont les parties peuvent, en théorie, sortir à tout moment.
Ainsi, lorsque le médiateur bancaire rend un avis contraire à la position du bénéficiaire de services bancaires (souvent l’entreprise ou le particulier ayant saisi ce dernier), aucun mécanisme de contestation n’est envisagé par les textes. Cette absence s’entend toutefois très logiquement, puisque la solution proposée par le médiateur n’oblige pas. En ce sens, rechercher la prise de position inverse par le médiateur ne priverait en rien l’établissement de crédit de sa faculté d’accepter ou non l’issue de la procédure.
Il convient toutefois de présenter subsidiairement les différentes possibilités à disposition de la partie insatisfaite de la solution proposée par le médiateur. » (Extrait de juritravail.com du 31/05/2022)