
SYNTHÈSE
Une activité de médiation structurée pour faire face à une augmentation des saisines
Le champ de compétence du médiateur national de l’énergie (MNE), médiateur public
de la consommation, a été étendu par le législateur à plusieurs reprises depuis 2013, qu’il
s’agisse des personnes physiques ou morales susceptibles de le saisir (microentreprises ou
consommateurs non-professionnels), du type de litige concerné (exécution des contrats conclus
avec un distributeur, autoconsommation) ou des énergies éligibles à la médiation (toutes les
énergies domestiques). Cet élargissement paraît justifié au regard des difficultés rencontrées
par les consommateurs. Toutefois, le MNE instruit de façon peu justifiée un certain nombre de
saisines provenant de collectivités territoriales au motif qu’elles sont des personnes morales
assimilées à des non professionnels. La Cour recommande de les exclure expressément du
champ des personnes morales éligibles au service de médiation.
La forte augmentation du nombre de litiges dont le médiateur est saisi, notamment
depuis 2016, est la conséquence de plusieurs facteurs, dont en premier lieu l’intensification de
la concurrence sur les marchés de l’énergie et l’entrée de nouveaux fournisseurs n’en maîtrisant
pas les procédures et la réglementation. Des améliorations de productivité ont permis
d’absorber cette augmentation jusqu’en 2018 et de maîtriser le coût de la médiation. Ces
améliorations ont porté sur l’organisation des services, la mise en œuvre d’accords amiables et
le développement d’une plateforme de médiation en ligne. Par ailleurs, le taux de suivi des
recommandations s’est amélioré au cours de la période sous revue.
Toutefois, depuis 2019, on observe une dégradation du délai de traitement des saisines,
ce qui ne permet plus de respecter les délais prescrits par le code de la consommation. La
poursuite, au rythme actuel, de la hausse des litiges dont il est saisi posera à terme la question
de l’adéquation entre ses missions et les moyens humains dont il dispose.
La nécessaire régulation en amont des saisines du MNE à travers la gestion des réclamations par les fournisseurs
Le secteur de l’énergie présente la particularité, dans le paysage de la médiation de la
consommation, d’une coexistence d’un médiateur public, le MNE, et de deux médiateurs
d’entreprises (EDF et Engie). Le code de l’énergie dispose que la saisine d’un autre médiateur
ne fait pas obstacle au traitement d’un litige de consommation par le MNE, dès lors que l’objet
de ce litige relève de son champ de compétences. Le MNE a passé avec chacun des médiateurs
d’entreprise des conventions qui régissent, notamment, la coordination de leurs interventions.
La dualité de médiation entre le MNE et les médiateurs d’entreprises EDF et Engie,
rendue possible par la transposition de la directive européenne sur la médiation de 2013, conduit
à des écarts d’analyse dans l’examen des litiges. Au vu de ce constat, la création de nouveaux
dispositifs de médiation internes à d’autres entreprises ne semble pas souhaitable. La Cour ne
remet toutefois pas en question la dualité de médiation. Elle considère, en revanche, que le
traitement des litiges par les fournisseurs devrait faire l’objet de moyens renforcés, de manière
à traiter de façon rapide et efficace les réclamations de leurs clients. Le MNE se trouve en effet
trop souvent saisi de litiges simples restés sans réponse. La régulation de ces saisines en amont de l’intervention du MNE suppose une responsabilisation accrue des fournisseurs. La Cour
recommande de les inciter à régler directement les litiges avec leur clientèle et, si nécessaire, à
renforcer leurs obligations réglementaires.
Une mission d’information confortée et une communication de plus en plus active.
La seconde mission statutaire du MNE, en lien avec plusieurs partenaires, est d’informer
les consommateurs sur leurs droits et de mettre à leur disposition les outils permettant une bonne
compréhension du fonctionnement du marché de l’énergie et de ses évolutions.
Le MNE a développé ces dernières années une communication active auprès des
consommateurs et des acteurs de l’énergie. Il gère le service d’information énergie-info qui
comprend un centre d’appels et un site internet dédié. Il a développé un comparateur d’offres,
devenu un outil de référence dont la loi a consacré l’existence. Un certain nombre de
publications complètent ces services et sont également disponibles en ligne. L’activité
d’information du MNE a augmenté au cours de la période sous revue, sous l’effet notamment
de la montée en puissance du comparateur d’offres mais également de la fréquentation
croissante du site énergie-info. Le coût de cette mission est maîtrisé.
Le MNE est par ailleurs reconnu par les acteurs de la consommation et les pouvoirs
publics ; il a développé une communication d’influence active, notamment à l’occasion de son
rapport annuel.
Gestion budgétaire et comptable : une clarification urgente des textes
applicables, des dépenses en diminution malgré l’augmentation de
l’activité
En application de l’article R. 122-10 du code de l’énergie, le décret n° 2012-1246 du
7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique (dit décret GBCP) est
applicable au MNE qui est, dans ce cadre, assimilé à un établissement public administratif. Le
médiateur n’applique cependant pas ce texte, au motif que le décret précité exclut de son champ
les autorités indépendantes.
La Cour invite les administrations concernées à prendre les textes nécessaires pour
préciser le statut budgétaire et comptable du MNE. Si le choix est fait d’aligner le MNE sur le
régime des autres autorités indépendantes et de ne pas lui appliquer le décret GBCP, il convient
d’abroger les dispositions contraires de l’article R 122-10 du code de l’énergie. En tout état de
cause, la situation actuelle ne peut perdurer et une clarification rapide s’impose.
Les dépenses de la structure se sont élevées en 2020 à 4,9 M€. Elles ont diminué de
20 % depuis 2013. Cette évolution résulte de la baisse du plafond d’emplois de 46 à 41 ETP,
d’économies de fonctionnement diverses ainsi que des efforts de productivité rendus
notamment possibles par le développement des outils de médiation. Malgré la baisse des
dépenses, les prévisions budgétaires sont restées supérieures à l’exécution, entraînant une
augmentation continue du fonds de roulement, dont le niveau (2,5 M€ en 2020) apparaît
excessif au regard des recettes de l’organisme (moins de 5 M€) et de ses besoins de fonctionnement.
Le déménagement récent du MNE dans les locaux du MTE permet des économies
substantielles. Pour autant, les conditions d’exécution par le ministère de la transition
énergétique du schéma immobilier qui a conduit au déménagement des services du MNE et à
accepter de différer celui de la Commission de régulation de l’énergie (CRE), se révèlent peu
cohérentes. Elles ont privé le MNE de possibilités de mutualisation et d’optimisation de ses
moyens avec la CRE. Quant aux gains présumés pour l’Etat, ils resteront à démontrer à la
lumière du bilan financier des travaux accomplis par la CRE et des contrats de sous-location
effectivement conclus dans les locaux laissés vacants par le MNE.
Une gestion à optimiser
Le MNE dispose de moyens humains limités pour assurer la gestion administrative et
financière de l’organisme. Ces moyens ont diminué sur la période malgré la montée en
puissance de l’activité.
Cette situation fragilise doublement le MNE. Tout d’abord, elle le rend très dépendant
de quelques personnes dont l’absence prolongée ou le départ pourrait porter préjudice à son
fonctionnement. Ensuite, en dépit de l’engagement réel des personnels concernés, elle ne
permet pas d’assurer le niveau de fiabilité et de performance attendu d’un organisme public.
La gestion quotidienne est assurée de façon correcte et la Cour n’a pas relevé de
dysfonctionnements majeurs. Elle a cependant mis en évidence certaines pratiques non
conformes à la réglementation ou aux règles internes de fonctionnement du MNE. C’est
notamment le cas en matière d’achats où les règles internes de mise en concurrence au premier
euro ne sont pas toujours mises en œuvre. De même, la traçabilité de certaines procédures de
marchés publics est insuffisante pour assurer la sécurité juridique des contrats passés. S’agissant
des ressources humaines, certaines des primes versées ne reposent sur aucun texte définissant
leur montant et leurs conditions d’attribution et ne figurent pas dans les contrats de travail. Les
textes internes supposés préciser l’ensemble des conditions de recrutement et d’emploi se
trouvent incomplets ou obsolètes.
Une partie de ces difficultés peut être résolue par une simplification des règles internes
que se fixe l’organisme et qui vont parfois au-delà de ce qui est exigé par les textes
réglementaires. L’abrogation systématique des dispositions anciennes à l’occasion d’une
actualisation des textes internes en matière de ressources humaines contribuerait aussi à clarifier
les règles applicables et assurer la bonne information des salariés sur leurs conditions d’emploi
et de rémunération. De même, l’information et le pilotage budgétaire pourraient être enrichis
par un meilleur suivi de l’évolution, sur la durée, des principales lignes de dépenses.
Néanmoins, la taille de l’organisme justifierait de confier une partie de la gestion à une
structure publique disposant des moyens adéquats. Cela permettrait de décharger le MNE de
certaines contraintes de gestion tout en lui permettant de la sécurité nécessaire à
l’accomplissement de ses missions. Cette démarche, déjà engagée avec la CRE, a été poursuivie
avec le ministère de la transition énergétique dans le cadre du déménagement à la Défense. Elle
porte aujourd’hui essentiellement sur les aspects logistiques (entretien de locaux,
affranchissement…) mais semble pouvoir être étendue, dans le respect de l’indépendance du
MNE, notamment en matière de ressources humaines (Extrait
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