« Le Médiateur de la République, les médiateurs du livre, les médiateurs chimiques, l’agent de médiation, l’enseignant-médiateur, le parent-médiateur, la médiation des apprentissages… Comment s’y retrouver ? Parle-t-on de la même chose ou n’aurait-on pas dû parfois choisir un autre mot pour ces situations visiblement si différentes ?
Médiation dans les conflits sociaux, médiation familiale, médiation de voisi nage, médiation à l’école… Retrouvant souvent aux détours de tous nos chemins, les termes médiation et médiateur, nous avons appris à les reconnaître comme liés aux règlements des nombreux conflits qui émaillent notre vie sociale et individuelle puis, petit à petit, à leur prévention. Spontanément, nous les décryptons en fonction de leur contexte. Mais que veulent bien dire exactement ces mots ? « (Extrait)
« Depuis plus d’une trentaine d’années, il est fait référence à la médiation sociale comme mode de réponse à des situations très diverses, voire comme « la » réponse quand la parole publique ne passe plus. De quoi s’agit-il ? Pourquoi fait-on appel à cette fonction – ou à ce terme – de façon si fréquente et dans des contextes multiples ?
En fait, la médiation apparaît dans un double mouvement.
Une médiation institutionnelle : ce terme est utilisé pour la première fois dans le cadre d’une fonction officielle, en 1973, avec la création du Médiateur de la République. Quelques années plus tard, apparaissent les premiers médiateurs dans les conflits sociaux.
Une médiation « citoyenne », née dans les années 1980 au sein même des groupes sociaux de milieux populaires : les femmes relais, les grands frères (Extrait)
« On sait que la médiation est l’une des formes anciennes de règlement des litiges, elle remonterait à des millénaires. Elle permettait dans les sociétés primitives de mettre fin à toutes sortes de conflits, tant entre particuliers qu’entre groupes sociaux opposés. Dans un monde, écrivait Emile Tyan1, parlant lui de l’Arabie préislamique, ou il n’existe pas de puissance publique ni d’État organisé, le tahkim – mot qui littéralement signifie arbitrage – va servir à tempérer le recours à la justice privée, ce qu’on appelle le thar, la loi du talion, œil pour œil, dent pour dent. L’intervention d’un hakam (arbitre) empêchera l’exercice du thar (vengeance) par la recherche d’un accord entre les parties pour établir le montant de ce qu’on appelle la diya, une compensation pécuniaire qui remplace le thar. En l’absence d’un système judiciaire organisé, c’est en toute matière qu’il pourra être fait appel au hakam aussi bien pour répondre à de simples dissensions familiales que pour résoudre des litiges entre particuliers ou même des querelles de pouvoir. Il peut arriver, parfois que le chef du clan, de la tribu, ou le sage du village prennent eux-mêmes l’initiative d’intervenir pour mettre fin au litige, notamment au cas où celui-ci risque de s’élargir : Mais lorsqu’il s’agit d’intérêts privés, c’est le plus souvent les parties elles mêmes qui conviennent de confier à un tiers le soin de trouver un accord. Dans les deux cas, il y a une interposition dans le litige d’une ou de deux personnes appelées hakam qui vont essayer de concilier les parties et de trouver avec elles une solution pouvant mettre fin au différend sans en référer à des normes préétablies ou à une autorité publique. » (Extrait)