
Résumé : La médiation pénale fait partie des procédures qui peuvent être proposées comme alternatives aux poursuites. Elle permet aux personnes de se réapproprier la résolution des conflits qui les concernent, en suivant une procédure plus souple et en favorisant à la fois la réparation, la responsabilisation et la resocialisation. L’article vise à analyser le sens et la portée de cette pratique à partir de la théorie pénale républicaine tirée des travaux de Philip Pettit et John Braithwaite. Une telle approche permet de saisir les effets de la médiation sur la domination en lien avec l’infraction ainsi que ses vertus restauratives. Mais elle met également en lumière des formes de soumission et de dépendance qui peuvent altérer le processus de médiation. Si, dans une perspective républicaine, la médiation s’avère plus juste que la répression, elle peut aussi, dans certains cas, reproduire des rapports de domination auxquels l’institution judiciaire doit accorder une vigilance particulière.
Criminal Mediation and the Issue of Domination
Criminal mediation is one of the procedures that can be proposed as an alternative to prosecution. It allows the persons to re-appropriate the resolution of conflicts that concern them through a more flexible procedure that promotes reparation, empowerment and resocialization. The article aims to analyse the meaning and scope of this practice based on a republican criminal theory derived from the work of Philip Pettit and John Braithwaite. Such an approach makes it possible to understand the effects of mediation on domination and its restorative virtues. But it also highlights forms of submission and dependence that can alter the mediation process. While, from a republican perspective, mediation is fairer than repression, it can also, in some cases, reproduce domination to which the judicial institution must pay particular attention.
LL’introduction de procédures de médiation dans la sphère pénale témoigne de la volonté de promouvoir une alternative aux sanctions pénales classiques ainsi qu’une autre manière de rendre justice qui privilégie la réparation des dommages, la responsabilisation des auteurs d’infraction et la restauration du lien social. Elle est ainsi le signe d’une transformation progressive de l’institution pénale et d’une évolution du cadre éthique et juridique qui sous-tend la résolution des contentieux et des conflits. Parler de la médiation pénale de manière abstraite peut sembler trompeur dans la mesure où elle se décline sous une multiplicité de variantes et de modèles. On le sait, l’univers de la médiation est pluriel et la médiation pénale renvoie à une diversité de pratiques et de procédures plus ou moins déjudiciarisées. Si les programmes de réconciliation entre victime et auteur d’infraction (VORP ou VOM) mis en place aux États-Unis dans les années soixante-dix ont été pionniers d’autres modèles ont progressivement été institués à travers le monde, dont il est impossible de dresser ici un inventaire. En France, la loi du 4 janvier 1993 marque la consécration de la médiation pénale. Elle permet au procureur de la République, préalablement à sa décision sur l’action publique, et lorsqu’il estime « qu’une telle mesure est susceptible d’assurer la réparation du dommage causé à la victime, de mettre fin au trouble résultant de l’infraction ou de contribuer au reclassement de l’auteur des faits », de « faire procéder, à la demande ou avec l’accord de la victime, à une mission de médiation entre l’auteur des faits et la victime » . La médiation consiste, « sous l’égide d’un tiers, à mettre en relation l’auteur et la victime afin de trouver un accord sur les modalités de réparation mais aussi de rétablir un lien et de favoriser, autant que possible, les conditions de non-réitération de l’infraction alors même que les parties sont appelées à se revoir » (Extrait)
