« Pour cette première chronique de l’année 2023, Jean-Philippe Tricot, maître de conférences à l’Université de Lille, vous propose de revenir sur plusieurs actualités en matière de modes alternatifs de règlement de différends, notamment sur un arrêt rendu par la 2ème chambre civile le 15 décembre dernier. » (Extrait de lexbase.fr)
« La médiation est aujourd’hui largement pratiquée. Le problème de sa confidentialité, que la doctrine avait déjà posé, a été partiellement résolu par un récent arrêt de la Cour de cassation.
Depuis le début des années 2000, et plus encore depuis la loi de 2016 portant modernisation de la justice au XXIe siècle, les modes alternatifs de règlement des conflits s’insèrent aujourd’hui, sous le sigle MARC, en droit positif français. La médiation en fait partie. L’article 131-1 du Code de procédure civile dispose que « le juge, saisi d’un litige peut, après avoir recueilli l’accord des parties, désigner une tierce personne afin d’entendre les parties et de confronter leurs points de vue pour leur permettre de trouver une solution au conflit qui les oppose ». Si le processus est aujourd’hui bien développé, il pose encore un certain nombre de difficultés au rang desquelles on trouve le problème de la confidentialité.
L’article 21-3 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 dispose que « sauf accord contraire des parties, la médiation est soumise au principe de confidentialité ». Ce principe est également posé aux articles 131-14 et 531 du Code de procédure civile et à l’article L. 213-2 du Code de justice administrative. Comme l’avait souligné M. Reverchon-Billot, le principe de confidentialité, ici énoncé, est le fondement de la justice participative1. Par l’application de ce principe, les constatations du médiateur et les déclarations recueillies au cours de la médiation ne peuvent être divulguées aux tiers ni invoquées ou produites dans le cadre d’une instance judiciaire ou arbitrale sans l’accord des parties.
Le principe est beau, mais il reste très difficile à mettre en œuvre. Il est vrai que tout au long de la médiation, les parties sont invitées à se rapprocher et à trouver un accord en faisant des concessions. La partie qui va vers son adversaire ne doit en aucun cas avoir à le faire avec la crainte que sa bonne volonté puisse se retourner contre elle. Les déclarations ou constatations du médiateur, de même que les offres faites par ce dernier, ne doivent pas pouvoir être utilisées par les parties au cours d’une procédure juridictionnelle2.
L’arrêt rendu le 9 juin 2022 par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation apporte quelques éclaircissements quant aux contours de la confidentialité de la médiation. » (Extrait de actu-juridique.fr du 9/02/2023)
C’est la première fois que nous présentons dans La lettre des Médiations un rapport sur « la médiation culturelle » et ceci dans le but d’illustrer une fois de plus que la médiation est un « mot-valise » qui recoupe de nombreuses réalités et pratiques. Il en est de même de la « médiation animale », de la « médiation scientifique »… que nous ne recensons pas actuellement dans la veille informative de la Lettre des Médiations. Cette question de la polysémie du mot médiation sera abordée dans un prochain numéro de la Revue des Médiations et nous ne pouvons qu’appeler à une réflexion plus générale sur celle-ci. Nous attendons vos réactions et contributions sur ce que l’on pourrait appeler le débat sur les « frontières » de la médiation et plus largement engager une réflexion sur ce que révèle dans nos sociétés actuelles cette utilisation intensive du concept de médiation dans des champs qui dépassent celui de la gestion des conflits. ( J-P BONAFE-SCHMITT – Lettre des Médiations)
« 1 – La notion de la médiation en archéologie
Plusieurs études et articles ont étudié la médiation en archéologie, son origine, ses objectifs, ses moyens, ses freins et ses leviers. Nous n’en visons pas ici une synthèse, mais l’identification de ses grandes orientations et la présentation du potentiel de cette discipline, encore souvent méconnue. La médiation en archéologie se développe depuis une soixantaine d’années :« la conservation patrimoniale du rapport de nos sociétés à leur passé, débute dans les années 60. Ses principales caractéristiques (primat de l’expérience, dimension sensible et émotionnelle, articulation du matériel et de l’immatériel, éthique de la transmission, démocratisation de l’expertise doivent beaucoup aux avancées de l’archéologie comme discipline et comme fait social » (Fabre 2014). « Pour le philosophe, le mot « médiation » signifie « articulation entre deux êtres ou deux termes au sein d’un processus dialectique (Larousse illustré, 1996). Il s’agit donc de faciliter la mise en place d’une dynamique de relation et d’échange entre deux parties : pour ce qui nous intéresse, le public et le patrimoine archéologique, dans le but d’obtenir un changement. La médiation est un processus créateur par lequel on passe d’une situation initiale à une situation modifiée. Elle permet au public de construire sa propre culture grâce aux outils d’analyse et de compréhension qu’elle met en œuvre entre lui et le patrimoine » (Maury et Rieu 1999 « animation ou médiation »). Le choix de médiatiser l’archéologie permet de poursuivre des objectifs pluriels : la médiation en archéologie constitue donc un point fort pour la transmission de nos patrimoines par leur compréhension : « Ainsi, le métier de médiateur en archéologie comporte des enjeux forts : ouvrir le regard sur le phénomène humain (faits d’hominisation et de cultures, organisation des sociétés du passé…) ; valoriser le patrimoine archéologique dans ce sens, c’est-à-dire en tant que témoin des activités humaines ; montrer l’importance de la recherche pour la connaissance et l’enrichissement du patrimoine ; faire prendre conscience de l’intérêt des découvertes scientifiques et de la sauvegarde du patrimoine pour appréhender le présent et construire l’avenir » (De Miranda 2010), « Se poser des questions sur les sociétés passées, leur mode de pensée, leur organisation sociale, leurs savoir-faire » (Giligny 2010) » (Extrait)