Publication de La Lettre de l’ANM n°15 de mai 2022


« All we are saying is give peace a chance »

Dialogues

Il y a 50 ans, en pleine guerre du Vietnam, John Lennon lançait cet appel au monde. Le 4 mars, 150 radios ont rediffusé cet appel à travers l’Europe, en témoignage de solidarité avec l’Ukraine. Comment croire que cette injonction ne restera pas lettre morte une fois encore ? Ce ne sont que des paroles de chanson, après tout, des souffles de voix qui s’évanouissent aussitôt qu’ils ont été proférés.

Et pourtant, deux personnalités emblématiques de notre temps ont cru en la force des mots. Dans un ouvrage qu’elles ont publié ensemble en 2020, elles expriment la conviction que s’il leur reste les mots, elles pourront reconstruire le monde. Donnons-leur la parole :

« Ce dialogue inattendu avec un homme musulman, tolérant, et pourtant père de djihadiste, représentait une extraordinaire opportunité de montrer qu’il nous était possible de parler. Si un tel échange avait lieu entre nous, alors nous pouvions abattre les murs de méfiance, d’incompréhension et de haine, qui divisent nos sociétés. » Ce sont les propos de Georges Salines, père de Lola, assassinée au Bataclan, le 13 novembre 2015.

« Aujourd’hui, c’est avant tout une histoire de confiance et d’amitié qui nous unit. Nous avons appris à nous apprécier, pour comprendre, ensemble, et prévenir. […] Pour qu’une telle horreur ne se répète jamais plus. » Ce sont les propos d’Azdyne Amimour, père de Samy, l’un des trois assaillants du Bataclan.

Alors que tout opposait et divisait Georges Salines et Azdyne Amimour, ils se sont rencontrés et, de leur rencontre a émergé un dialogue, promesse d’un monde où l’éducation parviendrait à saper les bases des fondamentalismes de tout acabit, en enseignant aux jeunes le sens critique et le sens de la mesure. Leur livre, intitulé précisément Il nous reste les mots, montre que le dialogue est possible lorsqu’au-delà des idéologies, des préjugés, des amalgames, des représentations, on peut retrouver l’humain. Le père de la victime et le père du terroriste viennent avec des histoires différentes, mais sont les acteurs d’un même drame ; ils ont une histoire commune et, à partir d’angles de vue différents, ils peuvent construire un récit commun et, à travers ce récit, un monde qu’ils pourront habiter ensemble.

Georges Salines a témoigné de l’urgence et de la nécessité de cette démarche le 22 octobre 2021 devant la cour d’assises spéciale de Paris : « La configuration de la cour d’assises fait que l’on ne s’adresse qu’au tribunal », dit-il. « On ne croise pas vraiment le regard des accusés et on n’est pas libre de dire ce qu’on voudrait dire […] Au procès, certains ont exprimé des remords. Mais comment savoir s’ils sont sincères ? Nous avons besoin de cette sincérité. Si c’était en face à face, cela me ferait du bien. J’aurais presque envie qu’il s’en sorte. Peut-être parce que j’étais médecin et que je reste dans une sorte de démarche thérapeutique pour les guérir de leur maladie de la pensée. Pas seulement pour moi ou pour lui, mais pour tout le monde. Ça donne une sorte de sens à tout cela. »

Saint-Exupéry nous l’a enseigné depuis longtemps : « La paix est la lecture d’un visage qui se montre à travers les choses quand elles ont reçu leur sens et leur place ». Donner la parole, c’est donner une place, donner du sens, donner de l’espoir, c’est aussi permettre de guérir « de la maladie de la pensée » et donner une chance à la paix… 

Janie Bugnion, ancienne déléguée du Comité international de la Croix-Rouge, médiatrice, membre du Forum suisse de justice restaurative, administratrice ANM

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Lettre à consulter sur https://www.anm-mediation.com/page-newsletter.php?id=211972

Journée d’Etudes : « La médiation de la consommation : bilan et avenir » les 23 et 24 juin 2022, Université Lyon II


« Mise en place par l’ordonnance du 14 mars 2016, la médiation de la consommation permet aux consommatrices et consommateurs de rechercher une solution amiable à leur litige avec un.e professionnel.le en faisant appel au service d’un.e médiateur/trice qui présente notamment des garanties d’indépendance et d’impartialité.

Plus de cinq ans après l’introduction du dispositif, l’ambition de ces journées d’études est de faire un bilan de ce nouveau processus de règlement amiable des litiges en réunissant ses principaux acteurs (consommateur/trices, professionnel.les, médiateur/trices de la consommation, organes et structures de régulation). (Extrait)

Programme et inscription sur https://droit.univ-lyon2.fr/faculte/vie-de-la-faculte/actualites/la-mediation-de-la-consommation-bilan-et-avenir